Mons-en-Barœul : Quand Mons possédait son propre dépôt de
munitions
Publié le 18 août 2016 par Alain Cadet dans La Voix du Nord
Une série de détonations dans le dépôt de Vimy, près
d’Arras, ont remis un coup de projecteur sur un problème récurrent :
l’explosion spontanée des munitions historiques. Si le fort Macdonald est
désormais bien paisible, il a abrité pendant plus de 30 ans un impressionnant
stock de munitions.
Les armes de nouvelles générations utilisant de la poudre B
: un canon Debange de 155 mm et les fusils Lebel.
Le fort de Mons a été édifié de 1878 à 1880, suivant les
plans du général Séré-de-Rivières. Comme tous ceux du même type (plus de 500 en
France), il possède 2 poudrières (*). La raison en est que, si l’une explose pour
une cause quelconque, on peut continuer à résister et soutenir le siège en
s’appuyant sur la seconde.
Chacune de ces poudrières est agencée suivante un modèle
architectural très étudié. La pièce de stockage est construite sur un vide
sanitaire permettant de drainer l’eau d’infiltration, de ventiler et d’aérer.
Les doubles murs (environ 2 m d’épaisseur) forment un couloir qui renforce ces
effets protecteurs.
(*) NDLR : Le terme de magasin à poudre remplace celui de poudrière, plus ancien, dans les différentes notices de l'époque.
Poudre noire
Cette organisation s’explique par le fait qu’avant 1885,
date de la mise au point de la poudre sans fumée à base de nitrate de
cellulose, on y stockait surtout de la poudre noire (ou poudre à canons). Sa
grande ennemie est l’humidité. Le danger d’accident provient surtout d’un
contact, même minime, avec une flamme. C’est pourquoi les lampes n’étaient
jamais situées dans la pièce principale. Elles étaient accrochées dans le
couloir de service et éclairaient le magasin à poudre à travers un double
vitrage.
L’accès était fermé au moyen de trois portes comportant
trois serrures différentes dont les clés étaient détenues par trois officiers.
Le risque de sabotage était ainsi quasiment nul.
À la fin des années 1880, l’usage du nitrate de cellulose
(dit poudre B) comme explosif propulseur fusant est une véritable révolution.
La poudre noire disparaît et des obus comparables à ceux qui seront utilisés
pendant la Première Guerre mondiale font leur apparition. Malgré tout, ces deux
poudrières monsoises restent de dimensions modestes (15 m x 5 m, environ) et
peuvent contenir environ chacune 60 tonnes d’explosifs. Elles sont destinées à
alimenter les batteries du fort (16 canons et quelques mortiers, pour l’essentiel).
Aujourd’hui, la poudrière Nord sert de lieu de répétition,
tandis que celle située au Sud sert de salle de projection polyvalente. A. CA.
(CLP)
Le pétardage consiste à enterrer des munitions avant de les
faire exploser. Ces explosions souterraines offrent beaucoup de sécurité aux
artificiers chargés de la destruction des bombes ou des obus.
Mais la méthode a des effets secondaires gênants. Selon une
étude américaine, les explosions de munitions par ce moyen provoquent beaucoup
plus de résidus qu’une explosion à l’air libre. Une partie importante des
produits chimiques contenus dans les engins n’est pas brûlée et se répand dans
le sol.
Un obus contient beaucoup de métaux ou métaux lourds (plomb,
cuivre, mercure, cadmium, etc.) et différents produits chimiques tels que
l’arsenic. Tous ces agents polluants vont se dissoudre avec les pluies et
atteindre à terme la nappe phréatique.
On s’est aperçu que les communes les plus polluées du Nord -
Pas-de-Calais n’étaient pas forcément celles qui avaient connu les combats les
plus intenses en 1914-1918 mais les zones de pétardage où, après-guerre, on
avait détruit une grande partie des stocks.
Ainsi, à Vendin-le-Vieil, une commune réputée pour avoir
connu une campagne de pétardage intense, le taux de perchlorate dans l’eau
dépassait ces dernières années les 40 µg par litre, alors que les normes
européennes ont fixé le seuil de perchlorate à 4 µg/l pour les nourrissons et
15 µg pour les femmes enceintes.
Les causes des explosions spontanées
L’explosion des dépôts de munitions sont des événements,
parfois dramatiques, récurrents en temps de paix comme en temps de guerre.
L’épisode le plus tragique, dans ce domaine, est sans doute celui de
l’explosion du dépôt de munitions allemand dit des « Dix-Huit Ponts ». Il
survint le 11 janvier 1916, fit pas loin de 170 morts et rasa une grande partie
du quartier Moulins-Lille.
À chaque fois qu’un nouvel accident se produit-on
s’interroge sur les causes de l’explosion. Les explications les plus probables
sont à chercher dans les dégradations des matières explosives, survenues avec
le temps. Les obus de la Première Guerre mondiale, datant d’environ un siècle,
sont sans doute les plus fragiles.
Il arrive que l’étincelle d’une explosion en chaîne soit un
obus chargé à la mélinite. Cet explosif brisant est redoutable. Il est fabriqué
à partir de l’acide picrique et a la particularité de former, au contact de certains
métaux (acier, plomb) des picrates instables qui explosent spontanément.
Le risque est plus grand avec les obus allemands, du fait
d’une technologie différente de celle des obus français. Mais, en général, ces
explosions spontanées sont dues au nitrate de cellulose, l’explosif fusant,
propulseur des obus. Instable avec le temps, il se dégrade, puis s’enflamme et
peut provoquer une réaction en chaîne. Il est particulièrement sensible aux
chocs, à la chaleur et au froid mais pas à l’humidité.
Les stocks de nitrate de cellulose de la poudrière nationale
de Toulouse, datant de la Grande Guerre, ont même été immergés dans des
sablières pour prévenir tout risque d’explosion.