Un Fort du système de défense Séré de Rivières

Construit en deux années seulement, de 1878 à 1880, le Fort de Mons-en-Barœul fait partie du système de défense élaboré par le général Séré de Rivières suite à la défaite de 1870. Devenu inutile suite à la mise au point de nouveaux explosifs 5 ans seulement après sa réalisation, il sera toutefois le siège d'unités de transmission, dont la plus étonnante sera celle d'une section colombophile avant de servir durant la guerre d'Indochine. Entre temps il aura connu des périodes d'occupation allemande à chacune des deux guerres mondiales, après avoir été déclassé 48 heures avant la déclaration de la première ! Resté intact, car non bétonné comme beaucoup d'autres fortifications, et magnifiquement remis en valeur avec un centre socio-culturel, c'est un exemple unique qui présente un intérêt architectural, historique et patrimonial exceptionnel.

Dans les mains ennemies / Lance-Corporal Richards' experience

Aaron Pegram, un australien qui a eu son arrière grand père prisonnier au Fort Macdonald de Mons-en-Barœul, est venu découvrir l'endroit de captivité de son ancêtre à deux reprises en 2007 et 2011. Il a publié, en Australie, dans les revues War Time et l'Advretiser, des articles qui ont mis en lumière cet épisode de la première guerre mondiale.



Un nouveau témoignage nous est parvenu d'un autre australien, Warren Richards, qui a fait lui aussi le déplacement en France, le 27 août 2018, sur les lieux de souffrance de son ascendant.



Warren Richards au Fort Macdonald de Mons-en-Barœul, le lundi 27 août 1918, 101 ans après le passage de son grand père, en avril 1917, comme prisonnier australien dans ce lieu que des témoignages nous ont décrit comme le " Trou noir ".

Dans les mains ennemies / In enemy hands

Lance-Corporal Richards' experience



Dans les mains de l’ennemi

Le soldat des Lanciers Richards de Bourke Srteet à Kalgoorlie est de retour à la maison après environ deux ans d’incarcération en Allemagne et quatre ans et demi de service au 16e Bataillon. 

Le soldat des lanciers Richards a participé au débarquement de Gallipoli, puis malade, il est évacué. Il rejoint ensuite son unité, en France, où il est engagé. Il est blessé puis capturé à Bullecourt, le 11 avril.

Lors d’un entretien avec notre journaliste, le soldat Richards lui a relaté quelques unes de ses aventures. « Ensuite, nous avons été faits prisonniers », raconte-t-il.  « Nous avons été emmenés au Fort Macdonald, à Lille. Nous étions morts de faim jusqu’à ce que, au bout de quelques jours, on nous donne un peu de nourriture et nous interroge sur les projets de nos états-majors de brigade et de division. Comme j’en ignorais tout on m’a fait goûter à ce qu’est un emprisonnement dans une cellule du sous-sol. On nous a dit que nous allions partir en Allemagne mais nous sommes restés au Fort Macdonald. Nous étions 110 prisonniers par cellule et la taille de chaque cellule n’était que de 8 yards par 15 (7,32 m x 13,72 m). On peut imaginer les horreurs d’une telle promiscuité. On ne pouvait pas se laver, même pas se nettoyer et beaucoup d’entre-nous sont tombés malades par manque de nourriture et absence de soins. Nos conditions de vie étaient épouvantables et nous dûmes les supporter pendant huit interminables jours.


Puis, ajoute le soldat des Lanciers, « nous avons été emmenés à Marqion, qui est à environ cinq kilomètres avant la ligne de front. C’est à peu près à ce moment que l’ordre suivant est arrivé :

Déclaration à l’intention des prisonniers anglais en transition

La demande des autorités allemandes de transférer les prisonniers allemands dans un leu situé à au moins trente kilomètres de la ligne de front n’a pas reçu de réponse de la part du Gouvernement anglais.

Par conséquent les prisonniers, dans le futur, seront affectés dans les zones de combat. Ils verront leur ration de nourriture réduite. Ils seront mal logés : pas de bain, pas de lit, pas de savon pour se laver et se raser, pas de serviettes, pas de chaussures. Ils ne seront pas payés et affectés à un travail pénible. Ils seront parqués près des canons allemands, exposés au tir des obus. Ces prisonniers anglais sont autorisés à écrire à leurs proches ou aux personnes influentes en Angleterre pour leur dire à quel point ils sont maltraités. Il n’y aura aucun changement à ces mauvais traitements jusqu’à ce que le Gouvernement anglais accepte la demande allemande. Il y va par conséquent de l’intérêt de ces prisonniers de faire de leur mieux pour permettre au Gouvernement allemand de transférer tous les prisonniers anglais, dans des camps en Allemagne où ils seront bien traités avec de la bonne nourriture, de bons vêtements etc. Vous obtiendrez satisfaction en écrivant comme il est indiqué ci-dessus et sans nul doute, le Gouvernement anglais consentira à la demande de l’Allemagne au bénéfice de ses compatriotes. On vous fournira les cartes postales, papiers à lettres et enveloppes nécessaires à cette correspondance. Vous exprimerez dans celle-ci vos conditions difficiles et elle sera envoyée en Angleterre par courrier express.

« Les représailles étaient très violentes », raconte le soldat des Lanciers, « et nous en étions réduits à manger des orties, des pissenlits et autres plantes ou mauvaises herbes. Il était impossible de signaler une maladie à moins d’être quasiment mort. Nous devions défiler à sept heures du matin et si nous étions en retard, la journée suivante, le défilé était fixé une demi-heure plus tôt jusqu’à atteindre deux heures et demie du matin. Il faisait un froid vif et nous ne possédions pas de vêtements chauds. Nous étions en permanence exposés aux tirs de nos propres obus. Nous souffrîmes de ces conditions affreuses du 24 avril au 10 juin. Nous fûmes transférés à Dinant. Nous y reçûmes un peu de nourriture et fûmes astreints à un travail pénible. Nous partîmes pour Nouchecourt,  puis vers Bouchain. Bientôt nous eûmes un contact avec la Croix-Rouge et reçûmes des colis en provenance d’Angleterre. Nous étions devenus quelque peu indépendants. 

« On nous a dit de charger et décharger les munitions mais nous l’avons refusé. Notre compagnie est devenue célèbre sous le nom de « Pig Company » (La Compagnie des têtes de cochon) et nous avons propagé nos idées auprès des autres prisonniers avec lesquels nous pouvions entrer en contact jusqu’à ce que les détenus refusent de manipuler, obus, fusils ou canons etc. »

En parlant de la brutalité des Allemands, la voix du caporal monte d’un ton. « J’ai  séjourné dans un hôpital, d’abord comme patient, puis comme aide », raconte-t-il. « J’y ai vu des scènes d’une incroyable sauvagerie et brutalité. Un sergent-major parcourait les quartiers avec un chien et un fouet et quel que soit l’état des patients, s’ils ne s’étaient pas mis au garde à vous à sa vue, il les fouettait avec sa lanière. Le traitement qu’infligeaient les allemands aux civils français était terrible. S’ils nous adressaient la parole, ils recevaient de grands coups de pied avant d’être envoyés au cachot. C’était affreux, et les femmes, les vieillards et les enfants étaient aussi maltraités que les hommes. Les Huns se révélaient être des brutes. »

Le soldat Richards est revenu terriblement amaigri des mains de l’ennemi. Son poids était de « 11 stones to under 7 » (44,5 kg au lieu des 70 kg). Quand l’armistice a été signé, il se trouvait dans la citadelle de Liège, témoin de la retraite allemande en Belgique. Il raconte que ses compagnons  ont été extraordinairement bien traités par les civils belges. Puis, rapidement, il a été rapatrié.



Le 11 avril 1917 à Bullecourt

Le texte anglais

Lance-Corporal Gilbert Richards, M.M., of Bourke-street, Kalgoorlie, arrived home recently after nearly two years' incarceration in Germany, and after four and a half years' general service with the 16th Battalion : Lance-CpL : Richards was present at the landing at Gallipoli, and was evacuated owing to ill health. Rejoining his unit, he served in France, sustaining one wound, until he was captured at Bullecourt on April 11. In conversation with a representative of this paper yesterday, Lance-Cpl. Richards narrated some of his experiences.

" After we were captured," he said, " we were taken. to Fort Mc Donald, in Lille. We were on starvation diet, and after a few days we were given a little food, and 'pumped' for information regarding the disposition of our divisional and brigade headquarters. I shammed complete ignorance, and as a reward was given a taste of imprisonment in an underground cellar. We had been told we were going to Germany, but we ended up in Fort McDonald. 

There were 110 prisoners in each compartment, and the size of the compartments was " eight yards by fifteen, so you can imagine the horrors of that confinement. We could not wash or clean ourselves, and many be came ill from lack of nourishment and general ill-treatment. The conditions were awful, and we had to suffer that for eight interminable days."

Then, said the lance-corporal, they were taken to Marquion, about five kilometres behind the line. About. this time the following order was issued :
"Declaration-To English Prisoners of Respite.

To the German request to withdraw the German prisoners of war to' a distance of at not less than 30 kilometres from the front line, the British Government has not replied. Therefore, it has been decided that all prisoners of war who will be taken prisoners in future will be kept as prisoners of respite, i.e., they will be very short of food, will have bad lodgings, no baths, no beds, no soap for washing or shaving, no towels, no boots, no pay, and hard work.

They will be kept beside the German guns under shell fire, etc. The English prisoners of respite are allowed to write to their relations or persons of influence in England, saying how badly they are treated, and that no alterations in the ill treatment will occur until the English Government. has consented to the German request. It is there fore in the interest of all English prisoners of respite to do their best to enable the German Government to remove all English prisoners of respite to camps in Germany, where they will be properly treated, with good food, good clothing, etc.
You, will succeed by writing as above, and then surely the English Government will consent to Germany's request for the sake of their own countrymen. You will be supplied with post cards, paper and envelopes. All this correspondence in which you explain your hard ships will be sent as express mail to England.

"The 'reprisals' were very thorough," said the Lance-Corporal, "and we were reduced to eating etinging nettles, dandelions, and other weeds and plants. It was im possible to report sick until you were nearly dead. We used to parade at 7 a.m., and, if the entire command was not on parade punctually, the time was fixed a half an hour earlier, until we were falling in at 2.30 a.m. It was cutting weather, and we had no warm clothing or beds. We were continually under our own shellfire. and we suffered awful conditions from April 24 to June 10. Then we transferred to Dinant. We were fed a little then, and then we were set to hard work. Then we went to Nouchecourt and from there to Bouchains. We were in touch with, the Red Cross now, and we" were receiving parcels of food from England, and we began to get a little independent. We were told to . start work handling munitions, but we refused this, until our company became known as the 'Pig Company,' and we spread our doctrine among all the othe prisoners with whom we came in contact until all the internees refused to handle -their shells, guns, etc."

Speanking of the brutality of the Germans, Lance-Corporal Richards' voice took on a stronger note. I was in a hospital, first as a patient and then as an orderly," he said, and I saw sights of incredible sav agery and brutality. One sergeant major paraded the wards with a dog and a dog whip, and if the patients, helpless or not, did not stiffen up at sight of him, he flogged them with the whip. The way the Germans treated the French civilians was terrible. If they spoke to us even they were kicked, maltreated, and thrown into prison. It was awful, and women, elderly and young, suffered in the same way as the men. The Huns showed themselves to be brutes."

Corporal Richards became fear fully emaciated while in the hands of the enemy, and his weight. Fell from 11 stone to under seven. He was in the Citadel of Liege when the armistice was signed, and wit nessed the German evacuation of Belgium. He and his mates were exceedingly well treated by the Belgian civilians, and he was shortly afterwards repatriated.



Bullecourt en 1917

Gilbert Richards

Documents association Eugénies ©
Reproduction non autorisée sans autorisation







Un article dans le bulletin municipal
Mons & Vous est paru en novembre 2018
à l'occasion du centenaire de la fin de ce conflit mondial